vendredi 28 novembre 2014

Jour 5 : le monde, mes proches et moi... les raisons du silence

Autant ma décision est clairement prise, autant je n'ai pas envie que ça devienne LE sujet de conversation dans mon entourage. Cette décision m'appartient, elle m'est totalement personnelle, et d'une certaine façon, elle ne regarde que moi. Si je ressens effectivement le besoin de m'exprimer par écrit sur le sujet, c'est plus, finalement, dans un geste autocentré, pour poser les choses, les fixer, les maturer, que par envie de discuter. L'avantage du blog, c'est que même s'il est accessible à tout le monde, rares sont les personnes non concernées par l'obésité qui vont prendre la peine de lire des témoignages sur le sujet. Du coup, ce blog peut être l'occasion d'échanger avec d'autres obèses (ou ex-obèses) qui en auraient envie ou besoin, sans qu'il y ait trop de risques d'interférences avec des minces.

Pourquoi je ne veux pas échanger avec des minces sur cette question ? Parce que s'il y a bien une chose que j'ai appris en quasiment un quart de siècle d'excès pondéral, c'est que les minces ne sont pas aptes à comprendre les obèses. Ils basculent presque tous et presque systématiquement au mieux dans les "bons conseils" (sans doute tout-à-fait valables pour des minces qui n'ont que quelques kilos à perdre), au pire dans le jugement. Et franchement, je me tamponne le coquillard avec une boule de coton de l'avis et des jugements de personnes qui ne peuvent pas comprendre ce que je vis, pourquoi je le vis et comment je le vis... Ce n'est pas une question d'entre soi, d'ostracisme ou de censure, c'est juste que quand on ne sait pas, on se tait et on laisse parler ceux qui savent. Et les minces ne savent pas, ne peuvent pas savoir et, dans la très grande majorité des cas, ne veulent pas savoir. Ce n'est pas une critique, entendons-nous bien : je ne sais pas ce que vivent, par exemple, les migrants en butte permanente au racisme, les invalides en butte au validisme, les transgenre en butte à la domination cisgenre... On est tous des ignorants de la réalité de ceux dont on ne partage pas les particularités. Le problème, c'est quand on se croit autorisé à leur expliquer comment ils doivent vivre leur "différence" alors qu'on n'y connaît strictement rien... Et ça, en revanche, oui, c'est une critique : je ne reconnais pas la légitimité des minces à me dire comment je devrais vivre, ce que je devrais faire, comment je devrais m'y prendre pour gérer mon poids. Surtout quand ils n'écoutent pas au préalable ce que j'ai à leur dire sur la question...

Et c'est la raison pour laquelle je n'ai pas envie d'en parler à l'immense majorité des gens de mon entourage. Pour l'heure, les seules personnes informées de ma décision sont mon compagnon (il est quand même concerné au premier chef, la chirurgie bariatrique ayant des conséquences importantes sur la vie quotidienne et pouvant en avoir sur les relations sociales), Mr Ex parce qu'on est assez proches pour pouvoir en parler sans que je craigne un flot de poncifs et parce que pour lui aussi, ça aura des conséquences, vu que notre fils est en résidence alternée, et mes amies elles-mêmes passées par ce chemin ou en cours de processus. Peut-être en parlerai-je à quelques autres personnes, parmi lesquelles mes plus proches amies, dont je ne crains pas le regard ni le jugement. Pour les autres, je ne sais pas encore quand ni même si j'aborderai le sujet. Je pense qu'il faudra d'abord que j'ai avancé dans le processus, échangé avec ma psy sur la question, évacué un certain nombre de problématiques parasites, pour être sûre de pouvoir affronter les inévitables remarques déplacées... Peut-être que le bon moment ne sera, finalement, que quand ces personnes constateront par elles-mêmes le changement. Je ne sais pas. En tout cas, une chose est sûre, ce n'est pas maintenant.

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