mercredi 26 novembre 2014

Jour 3 : de la beauté intérieure

Je parlais hier de cette étape fondamentale de l'acceptation de soi quand on est grosse : admettre que ce qui fait notre intérêt et notre richesse, ce sont nos qualités. C'est une réalité profonde, une des valeurs qui fondent ce que je suis et auxquelles je tiens. Valable pour tout un chacun, indépendamment de son poids, de son aspect physique, de ses "tares" ou de ses "handicaps" (ou du moins de ce qui est perçu comme tel dans notre société). La beauté physique n'apporte rien à la société, mais les qualités que recèle chaque individu la servent et l'enrichissent : n'est-ce pas, fondamentalement, ce qu'il y a de plus important au monde, d'être un élément constitutif de l'ensemble ? D'être utile à la communauté ?

Et pourtant, la notion de "beauté intérieure" me fait grimper au rideau... Ça peut paraître paradoxal, et en même temps pas tant que ça. Cette idée de beauté intérieure est en fait un concept qui ramène encore et toujours la focale sur la beauté extérieure. Comme si la seule chose qui avait de la valeur, c'était d'être beau. Comme si tout le reste n'existait pas ou n'était que quantité négligeable. Comme si être utile ne valait rien face à la sacro-sainte injonction à la beauté (et tant qu'à faire à la jeunesse).

Je crois qu'il n'y a pas grand chose que vous, les minces, puissiez dire de plus blessant à un gros que "Tu es tellement beau intérieurement !" Le fait même qu'il faille préciser est une insulte en soi. Quand je trouve une personne belle, ce n'est pas pour sa ressemblance avec la Vénus de Milo ou le Colosse de Rhodes... C'est pour ce qu'elle dégage, pour ce que son regard, son sourire, ses expressions, sa gestuelle disent d'elle, de ce qu'elle est, profondément. Je n'ai pas besoin de dire qu'elle est belle de l'intérieur. Elle est belle tout court. Parce que, à mes yeux, c'est cela et uniquement cela, la vraie beauté : ce que l'extérieur laisse apparaître de la richesse intérieure d'un individu. Vous pourrez avoir l'enveloppe la plus parfaite qui soit, si elle est vide ou remplie de préjugés, de haine, d'intolérance, de mesquinerie, de méchanceté, de défiance, d'orgueil, de mépris... vous ne serez jamais beau.


Peut-être est-ce là, en fait, la plus grande richesse des gros : être obligés de se confronter à ce qu'est réellement, profondément, la beauté pour s'accepter. Et par la même occasion, apprendre à la trouver chez les autres, à les accepter avec leurs propres imperfections, qui ne sont pas nécessairement les mêmes que les nôtres, mais qui n'en sont pas forcément moins pénibles à vivre, moins stigmatisées socialement, moins porteuses de fêlures.

Et c'est peut-être aussi pour ça que je suis prête, maintenant, à abandonner mon armure de chair. Parce que je n'en ai plus réellement besoin, au fond. Je n'ai plus besoin de prouver que j'existe en dehors du regard des autres : c'est un fait, ancré dans mes habitudes. Je n'ai plus vraiment peur de disparaître derrière une image.

PS : vous aurez tous reconnu Le Chat, de Philippr Gelück. Une de mes idoles !

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